Le Centre doit jouer cartes sur table

Craignant pour son siège au Conseil fédéral, le « ancien » PDC s'était laissé convaincre de la pertinence de sortir précipitamment du nucléaire après Fukushima. Doris Leuthard avait alors imité Angela Merkel. Maintenant que tout s'effondre, Le Centre doit réparer ce que le PDC a cassé.

L'ancienne conseillère fédérale PDC affirmait que la Stratégie énergétique 2050 ne devait coûter que 40 francs à une famille. Lors de la campagne en 2017, les 3’200 francs avancés alors par l'UDC comme coûts ont été tournés en ridicule par les partisans. En outre, il avait été affirmé que les centrales à gaz n'étaient pas nécessaires. Les études sur le gaz de l'Office fédéral de l'environnement ont désormais disparu d'Internet.

Est-ce l'une des raisons pour lesquelles le président du parti a fait disparaître le PDC? Son nouveau parti, Le Centre, ne semble ne plus rien à voir avec la stratégie énergétique. Gerhard Pfister a lui-même maintenu les centrales nucléaires après Fukushima, parce qu'elles sont respectueuses du climat.

La motion « Sortie progressive de l'énergie nucléaire » commandée par Doris Leuthard à son collègue de parti, le conseiller national et actuel conseiller d'Etat valaisan Roberto Schmidt, a déjà été traitée au Conseil national le 8 juin 2011. La motion avait été rédigée par le spécialiste autoproclamé de l'énergie du PS, Roger Nordmann. Comme une grande partie du PDC s'était laissé mettre sous pression par sa propre conseillère fédérale, la majorité bourgeoise du Parlement n'a pas suffi à rejeter la motion. Gerhard Pfister était absent, excusé, lors de ce vote. Il ne voulait probablement pas voter pour l'abandon de l'énergie nucléaire.

L'année 2011 était une année électorale. Le PDC, qui avait vu sa base électorale s'effriter depuis des années, allait-il continuer à dégringoler? Doris Leuthard, en tant que cheffe du DETEC, seule représentante du PDC au Conseil fédéral et ancienne cheffe de parti, avait deux problèmes : Premièrement, on s'attendait globalement à ce que les Verts et les Vert’libéraux progressent au détriment du PDC. Au pire des cas, cela aurait pu coûter le siège du PDC au Conseil fédéral. Donc, le siège de Doris Leuthard.

Deuxièmement, elle avait trois dossiers brûlants sur la table : Axpo, Alpiq et les Forces motrices bernoises (BKW Energie) avaient chacune déposé en 2008 une demande d'autorisation générale pour une nouvelle centrale nucléaire. Il était clair que pour le moment, une seule était envisageable - mais laquelle ? Cette question lui pesait apparemment particulièrement sur l'estomac.

Les initiés se souviennent qu'en janvier 2011, c'est-à-dire avant le tremblement de terre et le tsunami de Fukushima, elle voulait déjà aborder la question de la sortie du nucléaire lors d'une réunion du groupe parlementaire du PDC. La catastrophe de Fukushima est donc tombée à pic pour elle. Les trois demandes d'autorisations générales d'Alpiq, Axpo et BKW Energie ont été suspendues par Doris Leuthard dès le 14 mars 2011, soit trois jours après la catastrophe.

La tacticienne rusée Doris Leuthard semble alors avoir vu sa destinée : elle, l'ancienne membre du conseil d'administration de la compagnie d'électricité de Laufenburg (EGL), ancienne membre du comité directeur de l'Association suisse pour l'énergie atomique (ASPEA) et membre du Forum nucléaire, exigerait la sortie du nucléaire et arracherait le sujet aux Verts - comme Angela Merkel en Allemagne.

Le débat sur l’opposition entre les centrales à gaz et les centrales nucléaires, empêché par Leuthard en 2017, est désormais inévitable, car il est clair que la stratégie énergétique de Leuthard a échoué.

Le Centre semble toujours vouloir empêcher ce débat. Grâce à l'initiative « De l’électricité pour tous en tout temps (Stop au blackout) », ce sera possible en 2024. C'est alors que Le Centre, sous la présidence de Gerhard Pfister, devra jouer cartes sur table. L'objectif climatique qui vise la neutralité carbone est incompatible avec les centrales à gaz. Il faut des centrales nucléaires neutres en CO2, car le solaire et l’éolien ne suffisent pas à eux seuls à fournir de l'électricité à la Suisse en hiver.

Gerhard Pfister devra ajuster la boussole de la politique énergétique.